Que votre patient ait 25 ou 85 ans, lorsqu’il signale une douleur thoracique, vous devez toujours la traiter sérieusement.
Peut-être que la cause de la douleur thoracique n’est rien de plus qu’une indigestion, un claquage musculaire ou un autre problème inoffensif. Cependant, la douleur thoracique peut potentiellement indiquer une cause plus sérieuse et potentiellement mortelle, comme un infarctus aigu du myocarde (IAM).
Pour cette raison, la douleur thoracique doit toujours être considérée comme étant de nature cardiaque jusqu’à preuve du contraire.
Note : Cet article est destiné à rafraîchir les connaissances et ne doit pas remplacer les meilleures pratiques en matière de soins. Référez-vous toujours à la politique de votre établissement concernant la prise en charge des douleurs thoraciques.
Réaliser une évaluation précise de la douleur thoracique
L’une des compétences les plus importantes dont dispose le personnel soignant dans cette situation est la capacité à réaliser une évaluation précise de la douleur. C’est particulièrement le cas lorsqu’un patient ressent une douleur thoracique, car cela permettra de déterminer si la douleur est de nature cardiaque. Tout aussi importante, est la capacité du travailleur de la santé à effectuer cette évaluation d’une manière calme et contrôlée.
Il existe de nombreuses façons d’évaluer la douleur thoracique, cependant l’une des plus populaires est l’outil d’évaluation de la douleur ‘PQRST’.
Outil d’évaluation de la douleur ‘PQRST’
P – Position/Facteurs de provocation
- Où est la douleur ? Pouvez-vous la désigner ?
- Qu’est-ce qui a provoqué la douleur ?
- Qu’est-ce qui améliore la douleur ?
- Qu’est-ce qui aggrave la douleur ?
- Que faisiez-vous lorsque la douleur a commencé ?
- La douleur est-elle apparue au repos ou à l’effort ?
- La douleur change-t-elle avec le repositionnement ?
Tip : Le repositionnement a tendance à ne pas modifier la douleur thoracique causée par un IAM. Si le repositionnement améliore la douleur, peut-être le problème est-il d’origine musculo-squelettique, pleurétique ou péricardite (où la douleur est parfois soulagée en s’asseyant et en se penchant en avant). Les femmes qui subissent un IAM présentent souvent une douleur thoracique atypique et d’autres symptômes tels que la dyspnée, la faiblesse et la fatigue (Mehta et al. 2016).
Q – Qualité
- Pouvez-vous décrire la douleur ou l’inconfort ?
- Est-ce une douleur sourde, aiguë, comprimée, une pression, une brûlure, une douleur, un martèlement, une crampe, un coup de poignard ou un écrasement ?
Conseil : La majorité des patients subissant un IAM se déclarent avec une douleur thoracique (Malik et al. 2013 ; Lichtman et al. 2018), cependant, il arrive que la douleur soit atypique ou même absente (infarctus du myocarde silencieux) (Draman et al. 2013). Il faut se rappeler que chaque patient est différent et qu’ils ne présenteront pas tous la classique douleur thoracique substernale.
R – Rayonnement
- La douleur irradie-t-elle vers d’autres zones ?
- Pouvez-vous la pointer du doigt ?
Conseil : Environ 65 % des patients ayant subi un IAM ressentiront une douleur irradiante (Granot et al. 2019). Les sites communs comprennent la poitrine antérieure, les épaules, les bras, le cou et la mâchoire. Certains patients décrivent la douleur de la mâchoire comme une douleur sourde ou un mal de dents, tandis que d’autres peuvent décrire le rayonnement comme une bande autour des côtes.
S – Gravité/Symptômes
- Pouvez-vous évaluer la douleur sur dix ?(0 étant aucune douleur ressentie et 10 étant une douleur atroce.)
- Eprouvez-vous d’autres symptômes ?
Conseil : Les symptômes d’accompagnement d’un IAM peuvent inclure des nausées, des vomissements et une diaphorèse. Le patient peut également ressentir des vertiges, une hypotension et une bradycardie ou une sensation de malheur imminent et un sentiment de peur (Heart Foundation n.d. a).
T – Temps
- Depuis combien de temps avez-vous la douleur ?
- L’apparition a-t-elle été lente ou soudaine ?
- La douleur est-elle intermittente (elle commence et s’arrête) ou continue (permanente) ?
- Avez-vous déjà eu cette douleur auparavant ?
- Est-elle la même que la dernière fois, ou différente ?
Conseil : L’angine est généralement de courte durée et dure de 2 à 5 minutes si le facteur déclenchant est soulagé, par exemple l’exercice (Fondation des maladies du cœur s.d. b ; Fondation des maladies du cœur du Canada 2018). La douleur associée à l’IAM n’est généralement pas intermittente, bien qu’elle puisse l’être.
Je pense que la douleur thoracique peut être de nature cardiaque… Et maintenant ?
Il y a quelques principes importants à prendre en compte lors de la prise en charge d’une douleur thoracique de nature cardiaque. Tout d’abord, le cœur est un muscle qui a besoin de son propre approvisionnement en sang. Plus le cœur travaille dur, plus il a besoin d’oxygène. Fondamentalement, nous voulons augmenter l’apport en oxygène au cœur et réduire la demande en oxygène (Zefari et al. 2019).
L’oxygénothérapie dirigée vers un objectif
En ce qui concerne l’oxygénothérapie, les directives cliniques sur la gestion des syndromes coronariens aigus (SCA) publiées par la National Heart Foundation of Australia et la Cardiac Society of Australia and New Zealand indiquent :
‘L’utilisation systématique de l’oxygénothérapie chez les patients dont la saturation sanguine en oxygène (SaO2) >93% n’est pas recommandée, mais son utilisation lorsque la SaO2 est inférieure à ce niveau est préconisée malgré l’absence de données cliniques . Il convient toutefois d’être prudent chez les patients souffrant d’une maladie obstructive chronique des voies respiratoires, pour lesquels la SaO2 cible doit être comprise entre 88 et 92 %.’
(Chew et al. 2016)
Vasodilatateurs coronaires (nitrates)
Les nitrates agissent sur le muscle lisse vasculaire, produisant un effet vasodilatateur sur les veines et les artères, qui à son tour réduit les niveaux de calcium intracellulaire et entraîne une vasodilatation.
La nitro-glycérine (par ex. trinitrate de glycéryle – GTN) est souvent indiquée dans le cadre d’une douleur thoracique d’origine cardiaque car elle dilate les vaisseaux coronaires, améliorant ainsi la perfusion coronaire et l’apport d’oxygène au cœur (Australian Medicines Handbook 2020 ; Chew et al. 2016).
Note : le GTN présente plusieurs contre-indications, notamment son utilisation par un patient souffrant d’hypotension (AMH 2020), car il peut faire baisser davantage la pression artérielle en raison de son effet sur la réduction de la précharge et du volume systolique (Chew et al. 2016). Vérifiez toujours la politique de votre établissement de santé concernant l’administration de GTN.
Agrégateurs antiplaquettaires (Aspirine)
L’aspirine peut être prescrite (si elle n’est pas contre-indiquée) dans le cadre d’une douleur thoracique pour réduire le risque de formation de thrombus dans les vaisseaux sanguins (Chew et al. 2016). L’aspirine réduit la formation de thromboxanes, médiateurs de la vasoconstriction et de l’agrégation plaquettaire (AMH 2020).
Reposez-vous, rassurez et soulagez la douleur
Dans le cadre d’une douleur thoracique sévère, une analgésie opioïde (par ex.g. morphine, fentanyl) peut être envisagée (Chew et al. 2016).
Toujours se référer aux conseils du médecin/prescripteur du patient concernant la prescription et l’administration d’analgésiques.
Que dois-je faire d’autre ?
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Préparer et documenter les signes vitaux, y compris l’évaluation de la douleur ‘PQRST’.
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Informer immédiatement le personnel senior.
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Préaliser un ECG à 12 dérivations et le faire vérifier par un médecin militaire dès que possible.
Préaliser et interpréter un ECG à 12 dérivations est une évaluation vitale dans le cadre d’une douleur thoracique. Un ECG aidera l’équipe médicale à déterminer si et quand un patient a besoin d’un traitement de reperfusion pour traiter la cause de la douleur thoracique.
Les infirmières peuvent être encouragées à examiner un ECG à 12 dérivations avec un clinicien expérimenté pour identifier les changements ECG qui indiquent qu’un patient subit un événement ischémique. Il est impératif qu’un médecin militaire, un cardiologue ou un intensiviste examine l’ECG. Veillez toujours à traiter les signes et symptômes cliniques du patient afin de maximiser l’oxygénation et la perfusion du myocarde. Il est suggéré que l’infirmière obtienne un précédent ECG réalisé lors de l’admission ou d’un précédent événement cardiaque. Une RCP et une défibrillation précoces diminuent les taux de mortalité.
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Assurer un accès facile à un défibrillateur.
Le maintien de l’accès à un défibrillateur est inclus dans les lignes directrices actuelles sur la gestion des syndromes coronariens aigus (SCA) comme une priorité dans la gestion aiguë des douleurs thoraciques (Chew et al. 2016). En effet, l’accès à un défibrillateur permet d’éviter une mort cardiaque précoce causée par des arythmies réversibles. Les patients qui présentent un IAM peuvent avoir des arythmies associées.
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Le personnel médical senior peut alors ordonner des tests sanguins diagnostiques tels qu’un examen sanguin complet (FBE), la troponine, la biochimie et les électrolytes.
En dernier lieu, des tests sanguins diagnostiques peuvent être ordonnés. Généralement, il s’agit de tester le taux de troponine du patient. La troponine est une enzyme cardiaque ou un marqueur d’ischémie/infarctus.
Important : les directives cliniques indiquent que l’évaluation clinique initiale comprenant l’anamnèse, l’examen, l’ECG et le test de troponine simple ne peuvent exclure à eux seuls un diagnostic de SCA et que les patients suspectés de SCA doivent toujours être référés pour un diagnostic complet (Chew et al.)
Conclusion
Une évaluation précise de la douleur thoracique d’un patient permet d’identifier la cause probable de la douleur et conduit à des réponses rapides et appropriées pour soulager la douleur et traiter la cause. Maintenir un environnement calme et contrôlé est non seulement essentiel pour le confort du patient, mais aussi pour le vôtre !
Ressources supplémentaires :
- Les directives cliniques australiennes pour la gestion des syndromes coronariens aigus : https://www.heartfoundation.org.au/…Management_of_Acute_Coronary_Syndromes_2016.pdf.
- Australian Medicines Handbook 2020, Australian Medicines Handbook Online, AMH, consulté le 7 avril 2020, https://amhonline.amh.net.au/.
- Chew, DP, Scott, IA, Cullen, L, French, JK, Briffa, TG, Tideman, PA, Woodruffe, S, Kerri, A, Branagan, M & Aylward, PEG 2016, ‘National Heart Foundation of Australia & Cardiac Society of Australia and New Zealand : Australian Clinical Guidelines for the Management of Acute Coronary Syndromes 2016’, Heart Lung and Circulation, vol. 25, pp. 895-951, consulté le 24 mars 2020, https://www.heartfoundation.org.au/images/uploads/publications/Clinical_Guidelines_for_the_Management_of_Acute_Coronary_Syndromes_2016.pdf.
- Draman, MS, Thabit, H, Kiernan, TJ, O’Neill, J, Sreenan, S & McDermott, JH 2013, ‘A silent myocardial infarction in the diabetes outpatient clinic : case report and review of the literature’, Endocrinology, Diabetes & Metabolism Case Reports, consulté le 23 mars 2020, https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3921998/.
- Granot, M, Dagul, P & Aronson, D 2019, ‘Resting blood pressure modulates chest pain intensity in patients with acute myocardial infarction’, Pain Reports, vol. 4, no. 3, consulté le 24 mars 2020, https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6749909/.
- Fondation des maladies du cœur du Canada 2018, Angine, Fondation des maladies du cœur du Canada, consulté le 24 mars 2020, https://www.heartandstroke.ca/heart/conditions/angina.
- Fondation des maladies du cœur n.d. a, Symptômes de crise cardiaque, Fondation du cœur, consulté le 24 mars 2020, https://www.heartfoundation.org.au/your-heart/heart-attack-symptoms.
- Fondation du cœur n.d. b, Angine, Fondation du cœur, consulté le 24 mars 2020, https://www.heartfoundation.org.au/your-heart/heart-conditions/angina.
- Lichtman, JH, Leifheit, EC, Safdar, B, Bao, H, Krumholz, HM, Lorenze, NP, Daneshvar, M, Spertus, JA & D’onofrio, G 2018, ‘Sex Differences in the Presentation and Percetpion of Symptoms Among Young Patients with Myocardial Infarction’, Circulation, vol. 137, n° 8, p. 781-90, consulté le 7 avril 2020, https://www.ahajournals.org/doi/full/10.1161/circulationaha.117.031650.
- Malik, MA, Khan, SA, Safdar, S & Taseer, I 2013, ‘Chest Pain as a presenting complain in patients with acute myocardial infarction (AMI)’, Pakistan Journal of Medical Sciences, vol. 29, no. 2, pp. 565-8, consulté le 23 mars 2020, https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3809224/.
- Mehta, LS, Beckie, TM, DeVon, HA, Grines, CL, Krumholz, HM, Johnson, MN, Lindley, KJ, Vaccarino, V, Wang, TY, Waton, KE & Wenger, NK 2016, ‘Acute Myocardial Infarction in Women’, Circulation, vol. 133, n° 9, p. 916-47, consulté le 23 mars 2020, https://www.ahajournals.org/doi/10.1161/CIR.0000000000000351.
- Zafari AM, Abdou, MH, Talavera, F, Ali, YS, Yang, EH, Garas, SM, Jeroudi, AM & Reddy, SV 2019, ‘Traitement de l’infarctus du myocarde & Gestion’, Cardiologie, 7 mai, consulté le 24 mars 2020, https://emedicine.medscape.com/article/155919-treatment#d1.